La lettre ouverte du SNJ au ministre de la culture et de la communication

lundi 11 avril 2005
par  Catherine HAMAIDE
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LETTRE OUVERTE À RENAUD DONNEDIEU DE VABRES,

MINISTRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION

LIQUIDEZ-NOUS OU LIQUIDEZ VOS DETTES

Monsieur le Ministre,

Souffrez-vous en écoutant les antnnes de Radio France, alors que l’actualité devrait porter vers elles des millions d’auditeurs, qui ont besoin de nous, et que nous décevons ? Nous oui.

C’est le SNJ qui s’adresse à vous. Le syndicat qui l’année dernière, était aux premières loges d’une grève de dix huit jours, encore plus radicale, et qui, elle aussi, a fait souffrir les auditeurs.

Ecrire cela, cela va sans dire, c’est constater le réel et ce n’est pas condamner l’action menée par les personnels techniques et administratifs, dont nous sommes solidaires. La grève, les grévistes en souffrent encore plus que les autres !

Alors quoi ? Alors nous voudrions vous informer. Le message sera court. Il faut en finir, monsieur le ministre. Sortir d’un scandale devenu, on le voit bien, rigoureusement incontrôlable. Constater que les mêmes causes, exactement les mêmes, conduisent aux mêmes effets. Le blocage du point, c’est à dire de la base du calcul de tous les salaires, a placé depuis huit ans l’audiovisuel public dans une cocotte minute destinée à exploser.

On peut toujours tenir des colloques sur le bien fondé des disparités ou celui de l’augmentation réclamée par la grève actuelle. Mais le temps des colloques est révolu. L’urgence est dépassée. Le seul fait indiscutable, et qui échappe aux commentaires, c’est qu’un jour ou l’autre, sans soupape, une cocotte devient une bombe. Elle nous pète à la figure.

Ces huit ans de coupes sombres démolissent les structures. Nos dirigeants doivent le savoir et cesser de chercher des pansements et des bouts de sparadrap. Le temps des rustines est révolu.

Radio France est ingérable non pas à cause d’une espèce de tare génétique des salariés du service public qui seraient des parasites et des suceurs de richesse nationale, mais ingérable pour cause de politiques insensées menées par les gouvernements successifs. Ingérable comme l’était devenue la fonction publique, bloquée depuis deux ans, et pour laquelle votre collègue M. Dutreil, a trouvé de toute urgence un argent qui, disait-il trois jours plus tôt, n’existait pas sous les tapis.

Nous espérons que notre Président, Jean-Paul Cluzel prendra ses responsabilités, comme Jean Marie Cavada ne l’a pas fait l’année dernière. Etre assis sur le fauteuil de président, ce n’est pas s’asseoir sur les problèmes. Il doit vous dire, publiquement, face aux Français, que les gouvernements nous ont jetés dans une situation impossible en choisissant, depuis huit ans, volontairement ou par inconscience, de démolir Radio France en minant son édifice salarial.

Parlons clairement. Monsieur Le ministre, osez aller au bout de cette logique, si c’est la vôtre. Achevez-nous, liquidez-nous, et assumez-le devant la France. Ou bien sortez votre calculette. Constatez que Radio France c’est plus de cinquante antennes, c’est un travail irremplaçable qu’on n’entend nulle part ailleurs, un patrimoine, et que son rapport qualité-prix est loin d’être exorbitant. Comparez la minute de radio et la minute de télé, et faites la différence !

Donnez-nous les crédits minimums. Permettez à tous les salariés de cette maison de vivre, au sens premier du terme, c’est à dire de payer leur loyer. Faites-le au nom de la sagesse ou finissez-en, au nom d’une idéologie sommaire, que nous combattrons avec la dernière énergie. Un catéchisme au nom duquel tout centime supplémentaire versé dans le public serait un centime gaspillé.

C’est d’autant plus urgent que derrière l’explosion actuelle s’en prépare une autre, encore plus inévitable, et encore plus menaçante. Pour assurer ses missions, Radio France a fait supporter le blocage du point salarial à ses salariés pendant presque une décennie. Mais les dégâts ne s’arrêtent pas là. Radio France a aussi développé, bon an mal an, un trafic de main d’œuvre pour ainsi dire clandestine. Restrictions obligent ! Savez-vous que les différentes rédactions ont employé l’année dernière 620 journalistes titulaires, et 380 journalistes précaires. 60% d’une profession précarisée, utilisée au jour le jour, payée pire qu’au lance-pierre, et travaillant en dehors de tout cadre social pour la bonne et simple raison que la plus simple requête peut conduire ses intéressés au pire des licenciements. Celui qui ne fait pas de bruit. Le téléphone qui ne sonne plus.

Aujourd’hui, grève chez les personnels techniques et administratifs, parmi lesquels se trouve le prolétariat de Radio France. Demain, déflagration à propos des précaires, c’est à dire du sous-prolétariat.

Aux mêmes causes les mêmes effets. Plus d’argent, la course en avant pour « tourner » malgré tout, la pression, et un jour l’explosion, irrationnelle comme toutes les explosions.

Journalistes. PTA. Précaires. Un seul appel, Monsieur le Ministre.

Achevez-nous, liquidez France Inter, France Info, France Culture, France Musique, FIP, Le Mouv’, France Bleu et les locales. Faites nous taire, ou permettez-nous de vivre. Dans ce cas liquidez vos dettes. Vous nous devez huit ans.

Recevez, Monsieur le Ministre, l’assurance de notre considération.

Paris, le 8 avril 2005


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